"Apprendre", l’école de la République à hauteur d’enfants
![](https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_360/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=bZoPXivY 360w,
https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_480/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=tZcsMIBl 480w,
https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_640/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=Jxc70tL2 640w,
https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_800/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=NMkg_nUX 800w,
https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_1280/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=BhIoVkAt 1280w,
https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/16x9_1920/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=sFY07cVE 1600w)
![](https://prologue-alca.fr/sites/default/files/alca/styles/auto_32/public/ged/visuel_-_apprendre_-_portrait_-_claire_simon_les_films_hatari_madison_films_iwaso_films.jpg?itok=1Sgmc1uu)
Plus de trente ans après Récréations, la réalisatrice Claire Simon revient poser sa caméra à l’école. Apprendre est le très beau titre de son dernier film documentaire tourné dans une école élémentaire de la République, à Ivry-sur-Seine, en banlieue parisienne. En ces temps où l’éducation nationale est mise à mal, voici un hymne éblouissant d’humanité à celles et ceux qui en sont les acteurs du quotidien.
C’est la rentrée scolaire, le portail s’ouvre, et au milieu d’une cohue bigarrée émerge la figure de celui que l’on devine comme étant le directeur de l’école Makarenko, dont le nom apparaît en grosses lettres au-dessus de la palissade orange et jaune. L’homme a des paroles rassurantes et laisse paraître une empathie qui, d’emblée, nous donne envie de pénétrer dans cet établissement. Et lorsque les enfants, l’un après l’autre, viennent lui faire un câlin en guise de bonjour, nous nous installons définitivement dans ce film avec bonne humeur et déjà une pointe d’émotion. Celle-ci ne fera que s’amplifier au fil des séquences qui, tour à tour, nous font rire, nous émeuvent ou nous déconcertent. Claire Simon elle-même – mais peut-être comme tout documentariste – s’est laissée surprendre : "Quand je fais un film documentaire, je ne sais pas ce que je vais découvrir, et là, cela a été un coup de foudre permanent."1
La réalisatrice filme avec une incroyable acuité les visages de ces enfants sur lesquels transparaît tout ce qu’ils pensent et ressentent. Lorsque le petit Mohammed, interrogé par son professeur, triture nerveusement sa règle sans parvenir à trouver la réponse, nous replongeons dans notre propre enfance, vivant avec lui cet instant de malaise universel. À une précision près, c’est qu’ici, tout est bienveillance, attention portée à l’autre, à sa différence, dans un souci d’égalité et un esprit collectif. C’est une école où l’on apprend la communication non-violente, comme l’explique le directeur à un élève batailleur dans un face-à-face qui fait partie des scènes mémorables de ce film : "Ici on met en place des choses pour faire en sorte que les enfants, quand ils ont quelque chose à dire, ils ne se tapent pas dessus, ils se parlent. Je peux te punir, mais à quoi ça sert ? Tu ne progresses pas." Apprendre aux enfants à penser et à discuter entre eux, tel est le pari réussi d’une équipe pédagogique exemplaire, dont on admire l’implication, la patience et l’enthousiasme.
La salle de classe est un condensé d’émotions, d’histoires et de dramaturgie qui en font un sujet de cinéma à part entière. Mais il fallait le regard à la fois artistique, sensible et empathique que Claire Simon pose sur cet univers clos pour en faire un film réussi. La réalisatrice aime les enfants, c’est certain, pour avoir ainsi su gagner leur confiance et faire oublier sa présence au point de parvenir à les filmer de si près et dans une vraie spontanéité. Le dispositif est des plus simples : une petite caméra FX3, comme un appareil photo, et la perche de son ingénieur du son, Pierre Bompy, qui capte jusqu’aux chuchotements des enfants. Les cinéastes se font oublier pour nous montrer cette fabrique du citoyen où, comme le dit Claire Simon, "les professeurs sont des civilisateurs et les enfants vivent ensemble".
1. Claire Simon, interviewée dans le cadre de l’émission "On aura tout vu", sur France Inter, 25 janvier 2025.