Beau Joueur
Delphine Gleize et le producteur Jérôme Dopffer (Les Productions Balthazar) reviennent sur la fabrication de Beau Joueur, film soutenu par la Région Nouvelle-Aquitaine et accompagné par ALCA, en salle depuis le 26 juin.
Vous avez suivi, de l’automne 2016 à la fin de la saison 2016/2017, le parcours de l’Aviron bayonnais et la vie de son vestiaire dans son combat pour le maintien du club en TOP 14, l’élite du rugby français. Pourquoi avoir commencé le documentaire à ce moment précis ?
Delphine Gleize : J’étais à ce moment-là en préparation d’un autre film qui racontait l’histoire d’amour entre une athlète et un coach. L’une des comédiennes travaillait son rôle au club de rugby de l’Union Bordeaux-Bègles, au contact de préparateurs physiques avec qui j’ai parlé d’entraineurs charismatiques parmi lesquels Vincent Etcheto. Bien que je ne le connaissais pas, son habileté avec les mots et la sympathie qu’ont à son endroit les personnes ayant travaillé avec lui m’ont convaincue. Je le rencontre en septembre 2016 et lui demande de suivre l’Aviron bayonnais le temps d’une journée. Il est ravi que l’on s’intéresse à lui et à son équipe qui vient d’accéder au TOP 14 et nous nous donnons rendez-vous en novembre. L’équipe a déjà connu sept défaites, je retrouve alors les joueurs dans un stade vide et sous une pluie battante. Même si tout le monde prévoit leur relégation en fin de saison, je sens quelque chose de fort, une sorte de fluide, qui me fait croire en leur chance.
Jérôme Dopffer : Cette proposition d’entrer dans les entrailles d’un club sportif français de haut niveau m’est immédiatement apparue comme une opportunité unique. D’autant que ce club de l’Aviron bayonnais a une forte identité, qu’il accueille 17 000 personnes chaque week-end dans son stade alors que la ville compte 50 000 habitants. Quand nous avions fait La Permission de minuit, dont des scènes ont été tournées pendant un match, nous avions été impressionnés par la ferveur des gens. Il m’était donc naturel d’accompagner Delphine sur ce projet, sans savoir d’ailleurs s’il allait s’étendre sur toute la saison.
Delphine Gleize : J’étais à ce moment-là en préparation d’un autre film qui racontait l’histoire d’amour entre une athlète et un coach. L’une des comédiennes travaillait son rôle au club de rugby de l’Union Bordeaux-Bègles, au contact de préparateurs physiques avec qui j’ai parlé d’entraineurs charismatiques parmi lesquels Vincent Etcheto. Bien que je ne le connaissais pas, son habileté avec les mots et la sympathie qu’ont à son endroit les personnes ayant travaillé avec lui m’ont convaincue. Je le rencontre en septembre 2016 et lui demande de suivre l’Aviron bayonnais le temps d’une journée. Il est ravi que l’on s’intéresse à lui et à son équipe qui vient d’accéder au TOP 14 et nous nous donnons rendez-vous en novembre. L’équipe a déjà connu sept défaites, je retrouve alors les joueurs dans un stade vide et sous une pluie battante. Même si tout le monde prévoit leur relégation en fin de saison, je sens quelque chose de fort, une sorte de fluide, qui me fait croire en leur chance.
Jérôme Dopffer : Cette proposition d’entrer dans les entrailles d’un club sportif français de haut niveau m’est immédiatement apparue comme une opportunité unique. D’autant que ce club de l’Aviron bayonnais a une forte identité, qu’il accueille 17 000 personnes chaque week-end dans son stade alors que la ville compte 50 000 habitants. Quand nous avions fait La Permission de minuit, dont des scènes ont été tournées pendant un match, nous avions été impressionnés par la ferveur des gens. Il m’était donc naturel d’accompagner Delphine sur ce projet, sans savoir d’ailleurs s’il allait s’étendre sur toute la saison.
"Il fallait oser ouvrir la porte du vestiaire où règne une forte tension et où les joueurs sont abattus."
Comment avez-vous gagné la confiance des joueurs et des instances nationales pour tourner ?
D.G. : Quand j’ai dit à Vincent Etcheto que je souhaitais faire ce film, il m’a répondu que sa mère avait vu et apprécié mes précédents et qu’il avait entièrement confiance. Je me retrouvais donc avec un libre accès dans tout le club, au plus près des joueurs. Vu des instances, mon projet a pu intriguer bien que je n’aie filmé aucune scène de match.
J.D. : L’élite du rugby français étant aujourd’hui très structurée, avec des droits télévisés très élevés, entre 7 et 12 caméras filmant chaque match comme un spectacle sportif, la présence de Delphine aux abords du terrain a évidemment interrogé. En somme, elle a fait ce film d’une manière un peu clandestine mais avec quelqu’un qui lui ouvre la porte, en l’occurrence Vincent Etcheto.
D.G. : Quand j’ai dit à Vincent Etcheto que je souhaitais faire ce film, il m’a répondu que sa mère avait vu et apprécié mes précédents et qu’il avait entièrement confiance. Je me retrouvais donc avec un libre accès dans tout le club, au plus près des joueurs. Vu des instances, mon projet a pu intriguer bien que je n’aie filmé aucune scène de match.
J.D. : L’élite du rugby français étant aujourd’hui très structurée, avec des droits télévisés très élevés, entre 7 et 12 caméras filmant chaque match comme un spectacle sportif, la présence de Delphine aux abords du terrain a évidemment interrogé. En somme, elle a fait ce film d’une manière un peu clandestine mais avec quelqu’un qui lui ouvre la porte, en l’occurrence Vincent Etcheto.
D.G. : Et les joueurs, le staff et même les présidents, qui ne m’ont jamais interdit d’entrer. Après de grosses défaites, assez régulièrement donc, il fallait oser ouvrir la porte du vestiaire où règne une forte tension et où les joueurs sont abattus.
Au gré de nombreuses défaites, certaines cuisantes, l’Aviron ne se maintiendra pas en TOP 14 au terme de la saison. Beau Joueur est d’une certaine manière un documentaire sur la défaite d’un groupe qui cherche tant mieux que mal à donner le meilleur de lui. Comment filme-t-on cette défaite, ses peines et ses espoirs éphémères ?
D.G. : Les joueurs m’ont appris que la victoire n’était pas quelque chose de fondamentalement généreux mais plutôt d’immédiat et éphémère. Dans leurs défaites, ils ont montré une force et un espoir constants, qui ne se délitaient pas. Ils sont restés unis toute la saison, même dans des moments extrêmement difficiles.
J.D. : Le film montre aussi comment il est possible de refabriquer un collectif qui s’est perdu. Comme pour nous lorsque nous devons faire un nouveau film, toute saison sportive nécessite de recréer les bases du jeu et de l’organisation. Ces bases, victorieuses la saison précédente, ne pouvaient pas être les mêmes la saison d’après. Si, dans le cinéma par exemple, on a tendance à reprendre ce qui marche bien, à creuser "le filon du succès", le sport nécessite il me semble une plus grande remise en cause.
"À l’instar de Cavaliers seuls, coréalisé avec Jean Rochefort, [...] on a trouvé dans le réel la fiction que l’on essayait d’écrire."
Votre œuvre cinématographique se compose essentiellement de drames ou de comédies dramatiques (La Permission de minuit, Carnages, L’homme qui rêvait d’un enfant,…) et les documentaires que vous avez réalisés, à l’instar de Cavaliers seuls et aujourd’hui Beau Joueur, montrent aussi des situations de difficultés mais toujours avec une étonnante positivité. Considérez-vous le documentaire, quel que soit son sujet, comme un objet humaniste et optimiste ?
D.G. : Le sujet d’un documentaire, qui va nous occuper pendant un ou deux ans, va être d’une certaine manière "sculpté" pour qu’il rende comme j’aurais pu le penser en fiction. Je vais chercher à être l’auteure de ce que je vais filmer. À l’instar de Cavaliers seuls, coréalisé avec Jean Rochefort : quand on a découvert ce trio infernal, on a trouvé dans le réel la fiction que l’on essayait d’écrire. Lors du premier jour de tournage de Beau joueur, j’ai senti des hommes blessés, certes abattus, mais qui recherchaient quelque part à retrouver un plaisir, une légèreté. C’est sous ce point de vue, qui m’est propre, que j’ai voulu raconter la saison.
J.D. : Je pense que le point commun dans les films de Delphine, c’est aussi de filmer des personnes blessées. L’une des difficultés sur Beau Joueur était de ne pas trop s’attacher à des destins individuels, à des personnages qui seraient détenteurs d’une vérité sur l’équipe. Si le manager, Vincent Etcheto, prend une grande place par sa fonction, il s’agit de ne pas accorder plus d’importance à un joueur plus qu’à un autre.
D.G. : D’autant que certains joueurs voulaient être filmés plus que d’autres. Chez les « pieds mouillés » [les supporters assistant aux entraînements de l’équipe même les jours de pluie, nldr] aussi, j’ai ressenti une certaine retenue dans le propos à cause de ma présence et en même temps une fierté d’avoir la parole. Une autre difficulté, et non des moindres, a été de ne pas me trouver trop près des joueurs ou trop près du staff. Je voyais par exemple la feuille de match avant que les joueurs ne connaissent son contenu mais mon rôle consiste à ne pas être pas dans l’intrigue.
Quelle a été pour la production l’importance du soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine pour tourner ce film sur une terre de rugby ?
J.D. : La Région Nouvelle-Aquitaine a toujours soutenu le travail de Delphine. Quand on a déposé la demande d’aide à la production, les réactions sur le projet ont été très enthousiastes. C’est très rassurant de pouvoir compter sur un tel partenaire qui comprend ce que l’on a envie de faire et qui nous soutient. Ce qui n’empêche pas par ailleurs de me faire retoquer sur d’autres projets.
Le lien avec la région est évident par le sujet du film et s’en trouve renforcé par sa diffusion. Beau Joueur sort le 5 juin en Nouvelle-Aquitaine, avec une tournée dans le Pays basque et un peu au-delà, avant la sortie nationale le 26 juin.
D.G. : Le sujet d’un documentaire, qui va nous occuper pendant un ou deux ans, va être d’une certaine manière "sculpté" pour qu’il rende comme j’aurais pu le penser en fiction. Je vais chercher à être l’auteure de ce que je vais filmer. À l’instar de Cavaliers seuls, coréalisé avec Jean Rochefort : quand on a découvert ce trio infernal, on a trouvé dans le réel la fiction que l’on essayait d’écrire. Lors du premier jour de tournage de Beau joueur, j’ai senti des hommes blessés, certes abattus, mais qui recherchaient quelque part à retrouver un plaisir, une légèreté. C’est sous ce point de vue, qui m’est propre, que j’ai voulu raconter la saison.
J.D. : Je pense que le point commun dans les films de Delphine, c’est aussi de filmer des personnes blessées. L’une des difficultés sur Beau Joueur était de ne pas trop s’attacher à des destins individuels, à des personnages qui seraient détenteurs d’une vérité sur l’équipe. Si le manager, Vincent Etcheto, prend une grande place par sa fonction, il s’agit de ne pas accorder plus d’importance à un joueur plus qu’à un autre.
D.G. : D’autant que certains joueurs voulaient être filmés plus que d’autres. Chez les « pieds mouillés » [les supporters assistant aux entraînements de l’équipe même les jours de pluie, nldr] aussi, j’ai ressenti une certaine retenue dans le propos à cause de ma présence et en même temps une fierté d’avoir la parole. Une autre difficulté, et non des moindres, a été de ne pas me trouver trop près des joueurs ou trop près du staff. Je voyais par exemple la feuille de match avant que les joueurs ne connaissent son contenu mais mon rôle consiste à ne pas être pas dans l’intrigue.
Quelle a été pour la production l’importance du soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine pour tourner ce film sur une terre de rugby ?
J.D. : La Région Nouvelle-Aquitaine a toujours soutenu le travail de Delphine. Quand on a déposé la demande d’aide à la production, les réactions sur le projet ont été très enthousiastes. C’est très rassurant de pouvoir compter sur un tel partenaire qui comprend ce que l’on a envie de faire et qui nous soutient. Ce qui n’empêche pas par ailleurs de me faire retoquer sur d’autres projets.
Le lien avec la région est évident par le sujet du film et s’en trouve renforcé par sa diffusion. Beau Joueur sort le 5 juin en Nouvelle-Aquitaine, avec une tournée dans le Pays basque et un peu au-delà, avant la sortie nationale le 26 juin.