"In-Flux", sur les chemins de la création dans l’Eurorégion
Premier magazine culturel de l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine, Euskadi, Navarre, In-Flux propose des portraits filmés sur les coulisses de la création artistique. Un projet collectif né à l’initiative de la réalisatrice Annabelle Basurko et du producteur Marc Faye.
L’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine, Euskadi, Navarre constitue un vaste territoire : deux pays, trois régions et trois langues ! Presque aussi anciennes que la communauté européenne (aujourd’hui l’UE), les Eurorégions ont été mises en place pour développer des projets communs. Il en existe d’autres en France en-dehors de la Nouvelle-Aquitaine. "Dans les espaces frontaliers, les gens travaillent d’un territoire à l’autre, les cultures se mélangent", observe Annabelle Basurko, elle-même native de Dordogne, avec des origines basques. La réalisatrice est à l’initiative du premier magazine culturel de l’Eurorégion, In-Flux, produit par Marc Faye et sa société Novanima, en partenariat avec Arena Comunicación en Navarre et Marmoka Films en Euskadi.
"Ouvrir des portes, explorer plus loin"
Des arts vivants aux arts visuels en passant par l’écriture, In-Flux propose une approche pluridisciplinaire. Danse, performance, théâtre, arts plastiques, bande dessinée, photo, etc. "Le fil conducteur du magazine, c’est ce qui fait émerger l’impulsion créative, en lien avec un territoire", explique Annabelle Basurko. Chaque saison rassemble vingt-quatre portraits de six minutes chacun, deux saisons existent déjà et la troisième est en préparation pour 2022. Les artistes viennent de plusieurs pays et de Nouvelle-Aquitaine, toujours en résonance avec le lieu où ils séjournent, résidence ou workshop. Le projet d’In-Flux est aussi collectif par ses auteurs puisque les portraits sont confiés à des réalisateurs différents : Annabelle Basurko vit en Gironde, Guilio Boato évolue entre Bordeaux et l’Italie, Alex García de Bikuna réside à Bilbao, Miguel Garicía Iraburu en Navarre.
Annabelle Basurko et Marc Faye. © Benoit Hermet
On ne saurait lister tous les artistes filmés dans ces deux premières saisons. Reconnus ou émergeants, toutes et tous construisent des liens très personnels avec le territoire. Dans la première saison, le conteur ivoirien Ange Grah nous plonge dans son art lors d’une résidence dans la Creuse, à l’invitation de l’association la Métive. Toujours dans cette première saison, on peut suivre la plasticienne franco-coréenne Ji-Min Park au Pôle international de la préhistoire des Eyzies, en Dordogne. L’artiste réalise de délicates sculptures en latex et végétaux cueillis dans la nature, interrogeant la question des origines et de l’identité. Dans la deuxième saison, le chorégraphe Jon Maya prépare son nouveau spectacle au centre Niessen en Euskadi, un lieu qui compte beaucoup dans l’histoire de sa compagnie. "Il est très important de prendre racine où que l’on soit pour pouvoir s’élancer de là", dit-il au cours du film, son art tissant des liens entre danse contemporaine et traditions basques. En Navarre, le centre El Punto Gunea accueille les circaciennes Amaya Goñi et Sophie Núñez. L’expérience du confinement leur inspire des dialogues corporels au trapèze sur les thèmes de la solitude et de l’isolement. "La résidence nous donne beaucoup de temps pour proposer, mûrir, ouvrir des portes, explorer un peu plus loin…", confient les deux artistes.
Une cartographie culturelle des territoires
"L’ADN d’In-Flux, c’est cette notion d’expérimentation et d’intuition dans la genèse d’une œuvre. Notre magazine s’attache à l’esquisse", explique Marc Faye. L’approche formelle des portraits permet une intimité avec le spectateur. S’éloignant du reportage traditionnel, ils constituent plutôt des approches sensibles, qui donnent du temps à la parole. "On s’arrête dans un lieu et on écoute. L’art c’est aussi un décor, un paysage, des visages… On explore les coulisses de la création, ses mystères, et les artistes se dévoilent davantage que si l’œuvre était finie", souligne Annabelle Basurko. Les films intègrent aussi des moments de silence et de contemplation, la réalisatrice et le producteur soulignant l’échange qui se crée. Eux-mêmes ont des parcours d’auteurs. Annabelle Basurko a travaillé longtemps en tant que monteuse. Elle est également réalisatrice de documentaires comme La Révolution des cantines, une co-production Novanima et France 3 Nouvelle-Aquitaine. Marc Faye a réalisé lui aussi plusieurs documentaires, notamment sur des dessinateurs de la Belle Époque, ainsi qu’une mini-série d’animation intitulée Républicature. Sa société Novanima a produit une cinquantaine de films qui ont la particularité d’être des documentaires de création, mêlant des formes d’images hybrides pour traiter un sujet.
"Les dispositifs de résidence permettent aux créateurs de s’immerger dans leur travail, sans être bousculés par le quotidien", poursuit Marc Faye. Résidences et workshops montrent une véritable diversité, une sorte de cartographie culturelle de l’Eurorégion que l’on se plaît à découvrir. Les portraits d’In-Flux ont pour cadre des centres d’art, comme Vassivière en Limousin, Nekatoenea sur la côte basque, Huarte en Navarre ; des maisons des auteurs, comme celle d’Angoulême, le Chalet Mauriac à Saint-Symphorien ; des théâtres à l'instar de l’Odyssée à Périgueux ; des centres chorégraphiques tels que Niessen ou Azkuna Zentroa en Euskadi. On retrouve également des festivals qui organisent des workshops, comme le Fifib à Bordeaux, le festival de street art Points de vue à Bayonne…
Pour le moment, la saison 1 d’In-Flux est visible en version sous-titrée sur la web TV basque Kanaldude. Les épisodes de la saison 2 sont programmés sur France 3 et sa chaîne en ligne NOA. D’autres espaces de diffusion seront sans doute accessibles dans quelques temps pour découvrir ce beau travail.
In-Flux est un projet soutenu et accompagné par l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine Euskadi Navarre, la Région Nouvelle-Aquitaine, ALCA, le CNC, Centre national du cinéma et de l’image animée.
(Photo : Nico Pulcrano)