Le Festival Gribouillis à Bordeaux : une première édition fourmillante
La première édition du Festival Gribouillis a lieu cette année les 17 et 18 septembre à Bordeaux. Bande dessinée, livre jeunesse, dessin, salon du livre, rencontres, expositions : son programme est très riche et sa création a suscité l’enthousiasme. Rencontre avec Sarah Vuillermoz, l’heureuse initiatrice.
Une rencontre, un coup de foudre
S’il fallait raconter une histoire pour prouver l’importance des événements culturels dans l’accès à la culture, celle de Sarah Vuillermoz est idéale.
C’est à Colomiers, en Haute-Garonne, que débute l’histoire de Gribouillis. La petite Sarah et ses parents se rendent au festival de bande dessinée qui se tient là-bas depuis toujours. Sur le chemin, elle ne sait pas encore que cette promenade familiale va changer sa vie. Elle tombe littéralement amoureuse ce jour-là de la bande dessinée, des auteurs qu’elle voit dessiner "en vrai".
Des études en histoire de l’art, l’IUT métiers du livre et la rencontre avec David Fournol, notamment, auprès de qui elle fait son apprentissage dans la librairie Oscar Hibou, à Bordeaux, l’installent dans ce monde qui la passionne. Suivent 11 ans au rayon bandes dessinées dans la géante librairie Mollat, à Bordeaux, un formidable terrain de jeu pour faire découvrir à ce monde fou de visiteurs la petite édition qui passerait inaperçue, les éditeurs alternatifs, le patrimoine.
C’est pendant cette période que Stéphane Beaujean, alors directeur du Festival d’Angoulême, lui propose de faire partie du comité de sélection du festival – elle avait également été au jury quelques années auparavant. Par le comité, elle touche du doigt ce qui lui plaît vraiment, une autre économie du livre, celle qui met en valeur les auteurs, celle qu’elle a rencontrée, petite, à Colomiers. Alors que la production de bande dessinée s’industrialise, à son sens, elle se lance et propose le festival Gribouillis pour mettre son énergie à dévoiler des livres qui lui semblaient importants mais qui pourraient passer inaperçus, comme le travail de Lucas Méthé, qui aura son exposition à librairie La Mauvaise Réputation, une des plus grandes claques de lecture, un dessin étrange, libre. Aujourd’hui, pour boucler la boucle, elle a la chance d’avoir Amandine Doche, l’actuelle directrice du festival de Colomiers, comme "marraine de festival".
Les ingrédients du Festival Gribouillis
Ces dernières années, Sarah a parfois évoqué cette idée et toujours entendait : "Oui, tu devrais faire ça ! ça manque à Bordeaux". Alors, elle s’est lancée cette année, en pleine crise sanitaire. Aller vers un ralentissement, passer du temps avec les auteurs, les éditeurs et ne plus travailler au lance pierre, c’était son rêve.
"Bordeaux compte beaucoup d’auteurs (David Prudhomme, Laureline Mattiusi, Guillaume Trouillard et tant d’autres) en BD et en jeunesse, des éditeurs, dans le vivier de la Fabrique Pola, les Requins marteaux, Cornelius mais aussi Akileos ou les éditions de la Cerise."
Il fallait des livres ! Et Bordeaux compte beaucoup d’auteurs (David Prudhomme, Laureline Mattiusi, Guillaume Trouillard et tant d’autres) en BD et en jeunesse, des éditeurs, dans le vivier de la Fabrique Pola, les Requins marteaux, Cornelius mais aussi Akileos ou les éditions de la Cerise. Il est important de mettre en avant cette production. Les éditeurs émettaient ce besoin d’un salon du livre à la rentrée, en complément des événements du printemps que sont l’Escale du livre ou Regard 9.
Il fallait un lieu ! Le Garage Moderne répond présent. Et un quartier, Bacalan, Bassins à Flot, qui accueillera le temps d’un week-end, ce Festival Gribouillis. Ce choix est basé sur un coup de cœur, le quartier est très familial, les organisations locales, la bibliothèque de Bacalan, le Musée Mer Marine, l’Iboat Blonde Venus, les écoles seront au rendez-vous.
Il fallait un nom ! Gribouillis s’est imposé. Il parle de dessin, de l’expression agitée des émotions, il est enfantin, populaire – dans le but d’attirer un public familial – et représente une forme d’art brut.
Il fallait une identité ! Jochen Gerner est l’homme de la situation, à la croisée de la ligne claire, du minimalisme, il incarne bien l’identité du festival.
Le dernier ingrédient est l’enthousiasme avec lequel tous les acteurs du territoire ont accueilli le projet : les institutionnels, les auteurs, les maisons d’édition, les acteurs du livre.
"Ce projet un peu kamikaze, proposé en plein covid, a suscité un enthousiasme de toute part. Et surtout, je suis accompagnée par une dizaine d’amis, professionnels passionnés, qui, depuis un an, travaillent d’arrache-pied".
Une première édition prometteuse et chatoyante
Ce festival est un fourmillement. Un salon du livre dessiné, sur deux jours, réunira des auteurs, des autrices (une cinquantaine) des maisons d’édition (une trentaine), des librairies spécialisées, des animations et dédicaces, des ateliers et lectures. Des spectacles pour toute la famille seront proposés à Blonde Venus Iboat (lecture dessinée, spectacle musical et histoires étranges) et un colloque de recherche en illustration. C’est aussi une balade dans la ville pour découvrir les lieux culturels bordelais. Un parcours d’exposition mènera le visiteur de la bibliothèque Mériadeck avec Florence Dupré la Tour – Drôle de mauvaise fille ! – à la librairie La Mauvaise Réputation avec Lucas Méthé – Papa Maman Fiston : L’ivresse d’une famille sans pareille – et bien d’autres encore.
"Certaines personnes sont venues me proposer de s’ajouter à la programmation, c’est le cas pour le colloque de recherche en illustration organisé par Julien Béziat et Anne-Perrine Couët, intéressés de faire le lien entre la recherche, les auteurs et professionnels du livre."
"En une année, certaines personnes sont venues me proposer de s’ajouter à la programmation, c’est le cas pour le colloque de recherche en illustration organisé par Julien Béziat et Anne-Perrine Couët, intéressés de faire le lien entre la recherche, les auteurs et professionnels du livre. Cette idée de parcours dans la ville m’est chère, j’espère proposer un jeu de 7 familles, en disséminant des cartes sur certains lieux de la ville et chaque année composer une nouvelle famille"
L’ouverture du festival sera grandiose, une projection dessinée en direct sur la façade de l’église Saint-Siméon, alias le cinéma Utopia, qui accueillera aussi la clôture en proposant une projection en avant-première du film d’animation Le Sommet des dieux, réalisé par Patrick Imbert et d’après l’œuvre originale de Jirô Taniguchi.
Il est impossible de tout citer, le mieux c’est de suivre les actualités sur les réseaux ou sur le site du festival.
Deux prix à dotation
Pour sa première édition, le festival et les libraires Gribouillis (ceux du comité de sélection, partout en France et ceux du jury, à Bordeaux) lancent deux prix à dotation en bande dessinée et illustration jeunesse pour des ouvrages parus entre juin 2020 et mai 2021.
"Nous ne voulions pas d’une médaille en chocolat pour les auteurs. Les gagnants des prix sont plus souvent les maisons d’édition. Ici les auteurs gagneront une dotation, une sorte de bourse pour accompagner la suite de la carrière de ces auteurs souvent jeunes."
Et la suite ?
Le Festival Gribouillis sera un rendez-vous annuel. "J’ai des idées d’expositions pour les 10 prochaines années !"
L’ancrage est local, il accueille aussi des auteurs à dimension nationale et un auteur argentin qui vient dans le cadre d’un partenariat avec la Maison des auteurs d’Angoulême. Les prochaines éditions ne s’interdiront pas d’aller vers des auteurs internationaux.