"La Gardienne de la forêt" ou la lutte contre l’écocide en Amazonie
Dans un récit poignant et engagé, inspiré par des événements réels, Nathalie Bernard explore les conséquences dévastatrices de l'exploitation forestière illégale sur les habitants de la forêt amazonienne, à travers les yeux de Diana. Portrait saisissant d'une jeune fille résiliente de treize ans, refusant de se soumettre à l'injustice et déterminée à garder son monde intact.
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Le roman dépasse le cadre de la simple fiction jeunesse. La Gardienne de la forêt aborde, avec subtilité, les questions cruciales de la préservation de la biodiversité, du respect des cultures autochtones et témoigne des combats menés par les défenseurs de la nature.
"Le jour où il n’y aura plus d’arbres, le ciel tombera, les Indiens mourront et les Blancs aussi."
Dans le souffle initial de l'œuvre, l'épigraphe choisie par la romancière, empruntant les mots du Chef Raoni, résonne comme un appel vibrant à l'action. Cette invocation inaugurale jette les fondements d'une quête éclairée, proclamant l'urgence immuable de préserver notre écosystème pour les générations futures.
Le récit s'ouvre sur une scène tragique, avec l'assassinat du frère bien-aimé de Diana, Silvio, gardien dévoué de la forêt, tombé sous les coups des bûcherons sans scrupules. Profondément meurtrie par cette perte insupportable et nourrie d'une détermination féroce à perpétuer l'engagement de son frère, Diana s'érige en héritière courageuse.
"Mon arrière-grand-père Olimpio était un guerrier qui défendait la forêt. Mon grand-père Vovò est un guerrier qui défend la forêt. Mon père Leandro était un guerrier qui défendait la forêt et mon frère Silvio… était un guerrier qui défendait notre territoire... notre forêt… À mon tour, je veux participer à la lutte ! Je veux repousser avec vous ceux qui nous envahissent et détruisent notre forêt ! Je veux devenir une Gardienne !"
Avec une volonté inébranlable, elle investit les méandres virtuels des réseaux sociaux, dévoilant au monde entier les ravages de la déforestation, éveillant les consciences endormies face à l'urgence cruciale de cette cause. Portant le sort de tout un peuple sur ses épaules, elle s'arme de son téléphone portable, précieux témoin des derniers instants de son cher aîné, ralliant à sa cause les esprits réceptifs dans ce combat contre Goliath.
C'est alors qu'un événement providentiel vient éclairer l’horizon sombre de Diana : l'arrivée d'un journaliste français, Jonathan, venu capter l'écho retentissant de leur lutte acharnée. Proposant à Diana de porter son cri d'alarme au-delà des frontières, il lui offre l'opportunité de se rendre en France, pour témoigner de son combat.
"Ils m'écrivent qu'ils sont emballés par les extraits que je leur ai envoyés. Ils sont impressionnés par le buzz que tes vidéos ont généré et ils veulent que j'ajoute une deuxième partie sur toi à mon documentaire. - Tu dois être content. Tu as beaucoup d'images de moi. - Tu ne comprends pas, Diana : ils proposent de te faire venir en France."
Ce voyage marque un tournant décisif dans la vie de Diana, plongeant la jeune femme intrépide aux antipodes de son univers familier. Elle y découvre la richesse de nouvelles cultures et la diversité éclatante de paysages insoupçonnés. Mais en parallèle, elle se heurte au regard sceptique et désapprobateur de son grand-père, symbole d'une génération ancrée dans ses traditions et ses valeurs immuables.
En suivant l'histoire émouvante de Diana, le roman soulève au fil des pages, des questions fondamentales sur la société moderne, interrogeant la surabondance aveugle, le gaspillage insensé et l'indifférence cruelle envers les beautés fragiles de la nature.
L'origine de ce livre trouve ses racines dans un choc émotionnel vécu par la romancière Nathalie Bernard à la lecture d'un article de presse relatant la mort tragique de l’activiste environnemental brésilien Paulo Paulino Guajajara, abattu pour avoir défendu la planète. Ce qui rend ce roman d'autant plus saisissant, c'est le parallèle inattendu entre la réalité vécue par les Guajajaras en Amazonie et l'expérience personnelle de la romancière :
"Au même moment, un feu s’est déclaré dans la forêt landaise, à seulement quelques kilomètres de ma maison. Vingt mille hectares sont partis en fumée. J’ai écrit en observant les panaches de fumée et le rouge des brasiers dans le lointain. J’ai écrit dans la chaleur et les odeurs de brûlé tandis que les Canadairs allaient et venaient au-dessus de ma maison. J’ai écrit tandis que des amis devaient quitter leur maison en urgence. C’était terrifiant. La maison brûle, ce n’est pas une métaphore."
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La Gardienne de la forêt, de Nathalie Bernard
Ed. Thierry Magnier, 320 pages.