Unicorn Wars : une satire antimilitariste franco-espagnole innovante
Auteur prolifique issu de la tradition des comics underground, Alberto Vásquez est un réalisateur de films d’animation reconnu en Galice. Ses courts métrages ainsi que son premier long métrage ont notamment été distingués par trois Goyas. Son deuxième long métrage, Unicorn Wars, a été sélectionné au Festival international du film d’animation d’Annecy cette année et sort en salle le 28 décembre.
Ce délicieux film de genre transgressif à l’humour noir traite de la relation conflictuelle entre deux frères que tout oppose. Une relation qui puise ses racines dans un terrible secret familial... En toile de fond, la guerre sacrée entre les licornes et les oursons fait rage, ce qui permet à l’auteur de dérouler un point de vue iconoclaste empreint de dérision sur la guerre et la religion, et d’aborder des thématiques telles que l’envie, la jalousie et la manipulation, la folie et la trahison, tout en parodiant les films de guerre et d’horreur à travers des icônes de livres d’illustration pour enfant.
Cette coproduction internationale entre Uniko et Abano côté Espagne, et Autour de Minuit et Schmuby Production/Borderline Films côté français, découle d’une suite logique pour ces producteurs ayant déjà travaillé ensemble sur une précédente œuvre de l’auteur.
Le développement a été marqué par deux passages au Cartoon Movie, suivi d’un troisième en tant que film fini en 2022. Pour ce faire, un teaser de deux minutes a été fabriqué entre Paris, l’Espagne et Bordeaux. En dehors des soutiens de Media et des collectivités néo-aquitaines, le teaser a également été financé par le fonds Zineuskadi au Pays basque, où le compositing, le son ainsi que la musique ont été réalisés. Le design des personnages a été pris en charge à Bordeaux, où Alberto Vásquez a été accueilli pour travailler sur le storyboard. "C’était avant l’installation à Angoulême", précise Nicolas Schmerkin, fondateur des sociétés Autour de Minuit et Schmuby Production/Borderline Films.
Le réalisateur, issu du court métrage, était habitué à travailler de manière organique en petite équipe réunie sur place. Passer à un long métrage réparti entre quatre studios aux cultures différentes a nécessité une nouvelle organisation, avec plus d’encadrement et de pré-production. Le storyboard, réalisé en gouache et aquarelle, n’était pas exploitable en production. "Notre équipe angoumoisine était chargée de reprendre tout cela pour pouvoir monter l’animatique. Cela impliquait un travail de nettoyage, mais aussi de retravailler certains plans", poursuit le producteur.
À l’issue de ce développement, il a fallu se mettre d’accord sur une méthode commune. "À la suite d’analyses comparatives entre plusieurs outils, on a opté pour Blender, un outil open source permettant de mixer 2D et 3D. Pour des raisons financières, il était impossible d’animer les licornes en 2D", clarifie Nicolas Schmerkin.
Pour atteindre son équilibre financier, le film a fait appel au soutien de la Galice et de l’ICCA (équivalent du CNC espagnol), qui a fortement soutenu le projet à hauteur de 800 000 euros. Les chaînes de télévision espagnoles sont également venues en force sur le projet : 200 000 euros de la TV galicienne, 300 000 euros de la chaîne publique nationale TVE, complétés par l’apport de Movistar. Face à l’absence de financements obtenus côté chaîne de télévision française, le producteur se questionne : "On s’est fait bouler partout. Certaines chaînes ont dit que ça avait l’air super, mais qu’il n’y avait pas de case pour ce type de film, que la programmation ne saurait pas quoi en faire. On voit encore trop souvent l’animation comme lié à un public enfant… Mais ne peuvent-ils pas créer des cases, dans un contexte où Netflix et compagnie leur prennent des parts de marché ?" Pour compenser, le producteur a dû prendre plus de part sur le projet, ce qui n’est possible que grâce à l’activité de prestation qu’a le studio par ailleurs, ainsi que par l’activité audiovisuelle de la société, qui a pu convertir son compte automatique via le dispositif passerelle du CNC1.
Les aides institutionnelles ont donc été déterminantes dans le bouclage du financement : sont encore intervenus le CVS2 du CNC, l’aide à la production de la Région Nouvelle-Aquitaine et du Département de la Charente ainsi qu'Eurimages. "Nous ne pouvions pas prétendre au crédit d’impôt en France, mais pour un premier ou deuxième film sans crédit d’impôt, il est possible de monter à 70 % au niveau des aides publiques", explique le producteur.
La fabrication s’est étalée sur quatorze mois, ce qui est relativement condensé pour un long métrage d’animation de 85 minutes. En Espagne ont été réalisées les séquences 2D et en France, les séquences faisant apparaître les licornes animées en 3D.
Unicorn Wars sortira le 28 décembre en salle en France. Il sera distribué par Ufo, les ventes internationales étant assurées par Charades.
1 Plus d'informations sur ce dispositif
2 Aides à la création visuelle ou sonore par l'utilisation des technologies numériques de l'image et du son. Ces aides sont remplacées aujourd'hui par trois dispositifs distincts.