La Poudrerie et le Cafi de Saint-Livrade-sur-Lot sujets de création au lycée Fazanis
Dans le cadre du dispositif Résidences en territoire, le lycée agricole Fazanis de Tonneins, dans le Lot-et-Garonne, a accueilli en ses murs au premier semestre 2022 l'auteur de bande dessinée Marc Lizzano. Pendant six semaines, en lien avec le projet de médiation culturelle porté par l'association des Amis d'Yves Chaland, deux classes du lycée ont élaboré avec l'auteur un recueil d'histoires sous la forme d'un roman graphique sur la thématique de l'immigration avec un focus sur la Poudrerie1 et le Cafi2.
Retour sur l'expérience lors de la restitution du projet en présence de certains élèves avec Marc Lizzano et Thierry Cestac, enseignant référent.
Quel était pour vous l'objectif de cette résidence sur le fond, Thierry ?
Thierry Cestac : Pour moi, ce qui était primordial, c'est que les élèves s'autorisent à faire quelque chose d'inutile, de gratuit. C'est-à-dire qu'ils sortent de leur quotidien terre à terre, et qu'on leur donne la possibilité d'imaginer, de créer, et de prendre conscience que l'on peut avoir une expression artistique sans être artiste, même en étant limité par la technique.
Et sur la forme ?
T.C. : Au départ, on s'est appuyés sur l'histoire de la Poudrerie et du Cafi, mais il y avait aussi une opportunité pour les élèves de raconter leurs histoires, c'est-à-dire de conserver cette thématique autour de l'immigration mais en allant chercher les idées où bon leur semblerait, et de traiter l'immigration par le prisme de l'individu, pour donner des récits plus humains, moins scolaires.
Ça rejoint en effet un des axes de travail de l'association des Amis d'Yves Chaland, à savoir de parler du territoire comme terre d'immigration…
T.C. : Oui, d'autant que de nombreux élèves sont issus de l'immigration, en ayant des parents ou des grands-parents espagnols, italiens, algériens...
Comment les élèves se sont-ils approprié le projet ?
Marc Lizzano : Ils étaient assez libres, les récits familiaux et le contexte géopolitique actuel fournissent de nombreuses bases de sujet, dans la fiction comme dans le témoignage. De plus, rien n'était interdit sur la forme car en bande dessinée, tous les niveaux de langage et de récit sont admis. C'était donc assez dur pour eux au début de savoir ce qu'ils allaient raconter, il a fallu imaginer, débattre, tester les récit pour voir ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas, le tout avant de les mettre en forme.
T.C. : Avant même la venue de Marc, les élèves se sont documentés sur le Cafi. Puis, quand Marc est arrivé, il s'est d'abord employé à vulgariser et dédramatiser le processus de création auprès des élèves. Puis, une fois les récits arrêtés (il y a eu quelques errances), les élèves, par groupe de trois ou quatre par récit, ont travaillé sur la narration.
M.L. : Ce qui était intéressant, c'était de voir que les élèves voulaient donner du sens à leurs histoires
"Les élèves ont exploré avec enthousiasme de nombreuses pistes et techniques graphiques durant l'élaboration des récits."
Marc, dans quelle mesure ton univers créatif a-t-il influencé les élèves et le projet ?
M.L. : Ce n'est pas tant mon univers que ma démarche, cette envie de raconter des histoires très sensibles, comme par exemple le fait de dessiner des personnages avec des têtes disproportionnées pour pouvoir les rendre plus expressifs.
J'ai néanmoins constaté une certaine ressemblance entre ton œuvre et certains récits...
M.L. : C'est une des conséquences de la mise à disposition d'outils et d'astuces que je leur donne pour pallier leur manque d'expérience, mais qui leur permet de prendre conscience que la maîtrise du dessin n'est pas primordiale pour rendre un récit passionnant. En revanche les élèves ont exploré avec enthousiasme de nombreuses pistes et techniques graphiques durant l'élaboration des récits.
Qu'est-ce que la résidence a apporté aux élèves en dehors de votre objectif premier ?
T.C. : Une respiration, un espace de liberté et d'expression et un projet dont certains ont su s'emparer et s'investir au-delà de nos attentes.