L'agriculture vue par le cinéma au lycée La Peyrouse de Coulounieix-Chamiers
Après avoir partagé son travail sur Les Mystères de Paris quelques mois plus tôt, la réalisatrice Véronique Puybaret est revenue à l'automne 2021, dans le cadre du dispositif Résidences en territoire, au sein du lycée La Peyrouse, à Coulounieix-Chamiers, en Dordogne. Durant six semaines, elle a transmis son expérience aux lycéens lors d'ateliers visuels et documentaires notamment autour de l'agriculture, organisés avec la professeure de français Muriel Galmiche.
Comment s'est mise en place cette résidence, cette rencontre entre Véronique Puybaret et les lycéens, un an après une première expérience autour des Mystères de Paris ?
Muriel Galmiche : L'idée de travailler avec une personne disposant de compétences que je n'ai pas m'a semblée forcément une chance pour mon cours. Je trouvais intéressant que les élèves puissent faire avec Véronique à la fois de l'analyse, d'autant que nous avons participé au Mois du film documentaire, et de la création.
L'entente entre l'enseignant et l'artiste sur un temps aussi long est essentielle. Travailler ensemble pendant six semaines demande une préparation et une organisation adaptées mais dont le résultat est enrichissant pour les élèves mais aussi pour l'enseignant.
Véronique Puybaret : Nous nous sommes rencontrées l'an dernier avec Muriel, quand je suis venue travailler avec les élèves sur mon projet des Mystères de Paris. Nous avions chacune plusieurs idées de propositions et nous sommes assez vite tombées d'accord sur un programme. Cette année, nous avons travaillé sur l'agriculture, sujet que je ne connaissais pas plus que cela. Nous nous sommes vues pendant l'été et avons finalement trouvé des idées de projets.
Des créations ont-elles résulté des rencontres et des ateliers avec les lycéens ? Comment se sont organisés ces moments de travail et d'échange ?
V.P. : Les portraits de femmes agricultrices, projet qui me semblait d'ailleurs difficile à mener au départ, a abouti à de belles réalisations. Nous avons commencé ce travail par deux ou trois séances dédiées à l'analyse de portraits filmés, suivie d'une discussion sur la technique et le droit à l'image. Nous leur avons fait faire un storyboard et des autorisations afin de les mettre dans un contexte professionnel.
M.G. : L'idée était aussi de leur faire prendre conscience de la réalité du métier de cinéaste, que l'on ne fait pas un film de cinéma comme ils filment tous les jours avec leur téléphone. Le travail autour de l'intention, qui se réfléchit et s'écrit, était au centre de la démarche. Un autre objectif de ce projet était de les rendre capables de s'exprimer devant un public. Ils ont ainsi, en étant annoncés dans le cadre de la projection d'un documentaire, pu présenter leurs projets.
V.P. : Un autre exercice, plus plastique et organisé sous forme de concours, a consisté pour deux classes de BTS à détourner une œuvre de leur choix qu'ils ont repérée lors d'une visite au Louvre. Si certains étaient plus à l'aise techniquement avec les outils informatiques, je les ai tous trouvés impliqués dans la mesure où ils avaient le choix de l'œuvre. Ils ont chacun réalisé des recherches poussées avant de réaliser le détournement.
M.G. : Une troisième classe de BTS, qui elle ne s'est pas rendue au Louvre, a davantage participé au Mois du film documentaire, en travaillant notamment sur Les Glaneurs et la glaneuse d'Agnès Varda. Ce film recoupe bien les thématiques agricoles, agroalimentaires et environnementales qu'ils étudient toute l'année, et leur offre donc une référence culturelle à utiliser dans leurs travaux scolaires.
Au travers de ces ateliers, les lycéens ont donc eu le choix des sujets de leurs réalisations artistiques. Qu'a pu apporter cette liberté ?
V.P. : Nous avons notamment remarqué que ce ne sont pas forcément les meilleurs élèves qui produisent les réalisations artistiques les plus abouties. Cela peut valoriser des jeunes plus fragiles ou moins intégrés. Je pense aussi avoir apporté un peu plus de choix aux élèves en leur donnant la liberté de faire ce qu'ils aimaient. C'était évident l'an dernier lors des projets au cours desquels ils devaient parler de livres qui leur sont chers, libérant ainsi une parole personnelle qui n'est pas forcément toujours sollicitée.
Cette année, ils ont réalisé des films autobiographiques, à partir d'anecdotes personnelles, inspirés du Je me souviens de Perec. Les films les plus réussis sont les plus empreints d'émotions. Je salue d'ailleurs l'ouverture d'esprit de Murielle qui était en phase avec cette liberté laissée aux lycéens.